Edito

Christine Machiels (directrice du CARHOP)

Ce 10e numéro de Dynamiques. Histoire sociale en revue a les allures d’une parenthèse dans le défilé des dossiers thématiques qui ont été proposés jusqu’ici par l’équipe des historien.nes du CARHOP. Cette parenthèse n’a toutefois rien d’accessoire : pour son 10e numéro, le comité de rédaction de Dynamiques a souhaité relever le défi de « mettre des mots », « d’expliciter » la démarche d’éducation permanente du CARHOP, si souvent souterraine. Alliée à une approche sociohistorique des questions contemporaines, elle constitue l’ADN de ses projets.

Quoi de mieux pour appréhender la démarche que d’entrer dans les coulisses d’une formation d’adultes qui, le temps d’une année, explorent concrètement les potentialités de la discipline historique ? Celle-ci est envisagée comme un outil de compréhension de la société dans laquelle ils vivent, et, plus encore, comme un vecteur d’émancipation. Associée à une posture critique et rigoureuse, l’histoire sociale ne conduit-elle pas à réfléchir aux enjeux passés et présents du changement et de l’action ?

Ce dossier prend naturellement la forme d’un « retour d’expériences ». Le cadre est celui d’une formation d’adultes de l’Institut Supérieur de Culture Ouvrière (ISCO), organisée sur quatre années par le CIEP (le Centre d’Information et d’Education Populaire, l’organe de coordination culturelle du MOC) et la CNE (Centrale Nationale des Employés). La narratrice est Amélie Roucloux, jeune historienne du CARHOP, qui fait, entre janvier et juin 2019, pour la première fois l’expérience de suivre un groupe ISCO de 3e année. Le thème qui mobilise est celui de la démocratie et de la participation. Régulièrement mis en débat dans la société actuelle (mouvement des gilets jaunes, mise en cause de l’exercice de la citoyenneté, rôle des corps intermédiaires, etc.), ce thème est questionné par les militant.e.s en formation eux-mêmes.

Ce dossier de Dynamiques a ceci d’original qu’il est constitué d’un double récit : celui des étudiant.e.s d’abord, dont les travaux, issus de l’expérience collective, sont publiés dans la revue Dynamiques ; celui de l’historienne ensuite, qui a rédigé l’introduction et la conclusion du dossier. Dans la posture d’animatrice, elle a souhaité exprimer ses craintes et ses attentes, en additionnant à son expérience « subjective », de terrain, le témoignage de ses collègues historiens, plus aguerri.e.s à l’exercice, ainsi que le regard institutionnel des principaux acteurs de formation : la CNE (Emmanuel Bonami) et le CIEP (Mario Bucci). La démarche est collective : merci à Abdelkarim Balkich, Mohamed Ben Fredj, Wendy Chanoine, Barbara Chatelle, Nadine Demol, Christophe De Wandelaer, Laurence Gerardi, Elodie Ghaye, Anna Fanni, Arnaud Lechanteur, Samira Ouahabi, Samuel Willot. Ils/elles ont accepté de s’investir au-delà de la formation proprement dite, dans une démarche réflexive, si rarement explicitée, qui permet de mieux comprendre les tensions comme les défis de l’histoire, ou plus simplement du « rapport au temps », lorsqu’on s’attache à s’investir dans le présent, comme acteur ou actrice de changement.